Le 'Premier Sang' du clan [PV Malacay]

Au fur et à mesure que la jeune Akyria déployait ses pouvoirs, je faisais signe à Eeron de renforcer son sorts. Ses petits filament d'ombre semblaient avoir un appétit insatiable, s'avançant de plus en plus malgré la lumière grandissant à vu d'œil. Se contorsionnant autours de l'issu du pouvoir. Devenant de plus en plus vorace malgré la puissance qu'Eeron y mettait. Elle y arrivait, elle ne le contrôlait pas encore parfaitement, mais le principe était acquis. C'était beau, et efficace, aucune lumière ne franchissait l'ombre des tentacules malgré la force qu'y mettait Eeron qui semblait lui aussi intrigué par ce qu'il voyait. Se concentrant énormément afin de focaliser sa lumière et de la rendre la plus forte possible. J'observais ce phénomène avec un grand intérêt et rigueur scientifique. Car en réalité, je n'avais jamais vu les ténèbres agir de la sorte. Du moins, pas aussi délicatement.

Mais la petiote arrêta tout brusquement, stoppant net sa magie et Eeron dut faire de même pour ne pas que la lumière qu'il générait nous explose à la rétine. J'accourus vers Akyria pour la féliciter mais celle-ci semblait inquiète. Eeron ne semblait pas choqué ni même avoir mal. Juste un peu fatigué d'avoir déployé autant d'énergie. Il resta surpris, haussant simplement les épaules. Mais il répondit tout de même à Akyria.

"Très bien, ta magie ne m'a pas atteint si c'est ta question."
"En tous cas, ça fonctionne bien."

J'étais ravis, son sort fonctionnait à merveille. Et pleins de questions se bousculaient dans ma tête. Pouvait elle le déployer instantanément ? Pouvait elle réemployer cette lumière absorbée ? Pouvait elle simplement maitriser cette lumière ? Mais cela attendra une prochaine fois. Il fallait qu'elle mange un morceau après un tel exercice. Je finissais donc de m'approcher d'elle.

"Bravo, tu t'en es très bien sortie. Tu veux manger quelque chose, boire un coup ? C'est rapidement fatiguant les exercices magiques."

Loin de moi l'idée de la prendre pour une débutante car elle n'en était clairement pas une. Certes elle manquait de précision, mais je sentais qu'elle savait ce qu'elle faisait et l'envie de progresser. La preuve, je n'avais pas trop eut besoin de la guider sur ce qu'il fallait faire. Elle avait réussi à trouver toute seul. Cependant, comme tout bon mage, il faut impérativement connaitre ses limites et se ressourcer quand il le faut. Autrement, une crampe cérébrale est vite arrivée. Et ça fait très vite, très mal au crâne. Et je ne le lui souhaite pas. J'étais fière d'elle et j'espérais qu'elle le sentirais. Elle me faisait découvrir une facette des ténèbres que j'ignorais jusqu'alors.

La séance d'entraînement était terminée, stopée nette par mon intervention et par la présence de Malacay, quasi-instantanément à mes côtés, cherchant à me féliciter. Pourtant, seule l'état d'Ereon occupait mes pensées. Je n'étais aucunement habituée à manifester ma magie ainsi, je n'en connaissais guère les règles, les possibilités, et encore moins les effets. Mes doutes et mes craintes furent cependant balayées à l'instant où il haussait les épaules, témoignant qu'il était sauf. Mes filaments n'ayant pas eu le temps de le toucher, nous allions resté dans le flou quand à leurs potentiels effets pour ce soir.

A la place, Malacay m'intimait fortement d'envisager de prendre une colation, que cela soit de la nourriture ou de la boisson. Je ne ressentais ni fatigue ni gêne, ce n'était donc pas très urgent dans l'immédiat, mais la proposition était pleine de bon sens. J'acceptais donc. Non loin, des bancs étaient disposés, permettant à qui le souhaitait de pouvoir s'octroyer du répit, sans rester au milieu de l'espace. De plus, il y avait également à côté des petits baluchons qui semblaient préparés, et je me doutais de leur contenu : de rapides encas.

En désignant un non loin, j'en prenais la direction, ne prenant pas vraiment la peine de vérifier qui me suivait, c'était assez évident. Arrivée sur place, je balayais l'espace d'entraînement du regard, observant brièvement les autres membres du groupe dans leurs propres séances d'exercices avant de reporter mon attention sur l'un des petits sacs. J'avais eu raison sur la présence de nourriture à l'intérieur et m'apprêtais à me pencher pour en ramasser un quand une idée saugrenue me passait en tête. Me concentrant pour une énième fois aujourd'hui, je créais de nouveaux filaments, puis les faisais disparaître un par un jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'un dernier, seul et unique.

Avec ce dernier, je cherchais à le diriger vers l'ouverture du bâluchon. Mon objectif était évident : vérifier si il avait une consistance et pouvait intéragir avec le monde matériel. Hélas, lorsqu'il entra en contact avec la toile du sac, c'était comme si il passait à travers, sans laisser la moindre trace, ni le moindre effet. C'était comme un fantome à travers un mur. Je ne pouvais donc pas m'en servir pour attraper des objets. C'était dommage. Le dissipant prestement, j'appliquais la bonne vieille méthode classique en plantant mes griffes dans le contenant et en y ressortant l'encas qui était stocké, une sorte de sandwich. Facile à attraper et à déguster.

Et alors que je le dévorais avec entrain, je jetais un nouveau coup d'oeil à Ereon. Certes, il m'avait assuré n'avoir rien eu, mais je me demandais si c'était vrai, si il ne cherchait pas à m'éviter une quelconque culpabilité. Je secouais la tête. Il n'y avait aucune raison de mentir dans une telle situation. L'objectif avait été de tester mes pouvoirs. Cela aurait été contre-productif de mentir et d'oculter les possibilités, mais aussi les dangers de ma magie.

L'encas ayant fini sa course dans mon estomac et commençant petit à petit à considérer ma réussite de tantôt, mon moral et ma confiance étaient remontés à bloc. J'étais prête à un nouveau rond. D'autant qu'une nouvelle idée était dans ma tête. Cette fois, j'avais un autre objectif et une nouvelle cible à atteindre. Et alors que je me léchais les griffes, les nettoyant des restes de mon petit repas, je ramenais mon regard vers Malacay.

"Je veux réessayer contre le Manequin. J'ai une revanche à prendre." prononçais-je simplement, un sourire au museau. "En plus, je crois que j'ai eu une idée lumineuse."

J'observais la jeune Akyria qui me semblait perturbée malgré les affirmations d'Eeron. Silencieuse elle se déplaçait vers les différents baluchons que nous avions préparés pour nous repaitre après le petit entrainement. Les autres travaillaient chacun dans leur coin, cherchant à essayer de se maintenir en forme ou à s'améliorer soit ou son équipement. Discutant vivement de choses et d'autres notamment sur les techniques de combats. Je suivais la jeune dragonne, restant calme malgré la curiosité scientifique qui bouillonnait en moi. Je l'aurais volontiers assommée de question, mais je préférais attendre un peu et la laisser s'habituer à ses pouvoirs avant de lui demander des explications sur le fonctionnement de sa magie.

Je la laissais aller se ressourcer un peu en l'accompagnant pour savoir ce qu'elle voulait faire ensuite. C'est après avoir mangé un morceau qu'elle déclara vouloir retenter sa chance contre le mannequin. J'acquiesçais, et fit un signe à Elen qui s'approcha à nouveau pour se préparer à animer le mannequin.

"Tu sembles avoir une idée derrière la tête. J'ai hâte de te voir à l'œuvre."

Je m'écartais et le mannequin se réanima à la commande de la Hyène. Ce dernier, animé par de la magie noire n'attendit pas longtemps pour attaquer. J'observais la scène, attendant impatiemment de voir ce qu'Akyria avait préparé. Peut-être avait elle trouver une nouvelle technique ? Un point faible ? Que sais je encore ? Mais rien que de la voir aussi confiante et motivé me remplissait de joie et de bonheur. Sensations que je n'avais plus autant ressentis depuis bien longtemps. La haine nous a longtemps animé mes amis et moi même. Alors il nous était devenu rare de partager d'aussi bon moment. Et la tristesse des conflits et de la haine à notre égard déteignaient sur nous. Mais ce n'était pas le moment de penser à ses histoires moroses. Je voulais profiter de ce moment avec la jeune Akyria.

Mon protecteur recevait ma requête de manière positive, n'hésitant guère à soliciter bien rapidement une nouvelle participation de la nécromancienne du groupe. Celle-ci avait dû suivre les évènements de tantôt du coin de l'oeil, puisqu'elle ne posait absolument aucune question face à la demande. Au contaire, d'un geste rapide et précis, elle ordonait à l'autonomate magique de se relever à nouveau, s'offrant de nouveau à ma vue toujours aussi impressionée que j'étais face à la complexité d'une telle magie. Un jour, sûrement, je demanderai de plus amples détails. j'avais cependant l'esprit occupé sur d'autres choses.

Je quittais ainsi mon banc, rejoignant mon adversaire artificiel, une bonne distance nous séparant. Et à peine étais-je en position que le manequin lançait déjà son premier assaut de ce nouveau round. Mais comme la dernière fois, je pouvais compter sur mon agilité et mes réflexes pour ne pas me laisser décontenancée. C'est qu'être gosse de rue m'avait appris au moins cela : être toujours sur le qui-vive, chercher à ne pas se faire attraper, et échapper à l'assaillant le cas échéant.

Ainsi, au début, la même scène qu'auparavant semblait se passer. Lui cherchant à me saisir de ses griffes et crocs, moi évitant régulièrement ses attaques, tout en cherchant à mettre en pratique ce que j'avais appris entre-temps. Néanmoins, je devais reconnaître que c'était bien plus compliqué ainsi. Se concentrer sur soi tout en se déplaçant n'était pas une mince affaire et je n'avais en réalité que peu de moment de répit.

Les évènements d'entre-round avaient été fort instructif pour la petite dracène que j'étais. L'avantage quand on sait pas grand chose, c'est que le moindre apprentissage est un bond en terme de possibilité. Je repensais donc à la petite tâche blanche qui était apparu sur mon museau, mais également à mon professeur lapin et sa magnifique maîtrise de la lumière. Si seulement je pouvais...

La chance me souriait enfin lorsque je réussis à créer une bonne distance entre l'autonome nécrotique et moi, obtenue par un joli bond par-dessus lui. Profitant de cette opportunité, je puisais dans la lumière grapilée plus tôt. Je ne cherchais pas à matérialiser mon camouflage, cela était à la fois du gaspillage et contraire à l'idée que je souhaitais mettre en pratique.

Le manequin avait eu le temps de se retourner et prévoyait déjà de revenir à la charge. A court de temps, je priais pour que ma petite improvisation fonctionne, imaginant la fine pélicule de lumière sur moi, mais localisée sur une partie précise de mon corps.

De petits crépitements fusèrent autour de mes pattes avant, comme de tout petits éclairs noirs, puis je sentais une douce chaleur à la surface de mes griffes, comme si je les avais exposé à des rayons du soleil filtrant à travers une fenêtre. Leur apparence était légèrement différente. Blanches comme de l'ivoire, un peu plus longues et aiguisées

Le manequin me bondit dessus et me renversait sur le dos, m'imobilisant dans cette position délicate. Ne pouvant plus fuir, je me débattais, cherchant à le repousser malgré mon petit gabarit. Et alors que je lui donnais des coups de griffes, réussissant cette fois à entailler la surface de ses écailles, je devais me rendre à l'évidence que ce n'était cependant pas suffisant pour l'emporter.

Las, je déclarais fortfait pour une seconde défaite consécutive.

L'automate se retirait, obéissant aux ordres de la nécromantienne, me laissant me redresser et m'asseoir. Je regardais plus attentivement les lames de lumière que j'avais essayé de faire. C'était brouillon, clairement fait de manière inadéquate.

L'idée m'était venue d'un de mes amis, nommé Soth, qui faisait cela avec de métal contenu dans son corps. Mais je n'avais ni sa précision ni son expérience. Puis c'était pas très intelligent de ma part. Le métal est solide, robuste, et extrêmement tranchant. La lumière qui dansait sur mes pattes était tremblante, volatile, et cherchait constamment à s'échapper dans l'air.

Je remarquais alors Malacay a côté de moi. Il n'avait pas vraiment dit un mot depuis ma requête de revanche mais son regard avait un air étrange qui me semblait familier. Celui de la découverte et de la curiosité.

Je voyais bien qu'il regardait mes griffes avec attention. Je devais avouer que moi aussi j'étais surprise de pouvoir faire une telle chose. Ce n'était aucunement douloureux, ne me fatiguait presque pas. La seule contrainte que je ressentais, c'était de vider le stock de lumière en moi.

"C'est joli, non ? Je pourrais presque t'aider à cuisiner av... Oulà" cherchais-je à plaisanter, histoire de détendre l'atmosphère.

Je stoppais ma phrase, de même que mon flux de mana, tournant la tête vers mon épaule gauche, prenant conscience alors d'une belle blessure au niveau de mon aile, sans doute causée lorsque le manequin m'avait plaquée et maintenue au sol.

Elle était superficielle, mais saignait malgré tout, source du léger tournis qui me prenait, maintenant que l'adrénaline du combat tombait. Je grimaçais légèrement, examinant la plaie et les petites traces de sang coulant sur mes écailles.

Je me tournais rapidement Malacay et Elen et cherchais prestement à les rassurer. Certes, cela faisait un peu mal, mais la douleur était modérée. Mais, plus que tout, je m'inquiétais surtout pour eux. Sans m'en rendre compte, je pliais mon aile, cherchant à leur cacher la vue de mon sang et de la plaie bénigne.

"Je suis désolée, j'ai manqué de prudence. E-est-ce que ça va...? ça ne vous dérange pas, j'espère ?" Questionnais-je, voulant tout autant aller me soigner moi-même pour pas les importuner, mais aussi bien implacable de bouger après toutes ces sensations fortes.

J'observais la bataille avec attention, la jeune dragonne toujours aussi rapide et agile pour esquiver la plupart des attaques de l'adversaire. Je patientais, observant ses gestes et son flux de mana, guettant le moment où elle allait employer sa technique sur le mannequin. J'avais hâte de voir ça. Plusieurs fois elle manqua des opportunités, mais je la laissais faire. Après tout, j'ignorais ce qu'elle voulait faire. Et surtout, savait elle déjà le faire ? Où était ce qu'une idée qu'elle avait eut ? L'échange commençait à être long lorsqu'elle eut enfin une belle opportunité d'attaquer, mais qu'elle saisit pour user de sa magie afin d'invoquer des renforts de griffes en lumière. Ainsi, elle maitrisait bien les ténèbres et la lumière. C'était rare et son emploi était singulier.

Malheureusement, elle aurait probablement du essayer d'utiliser ce pouvoir avant de l'employer dans le feu de l'action. Le mannequin la renversa et rapidement, l'odeur de l'hémoglobine retint mes nasaux. J'eu un instant de frayeur pour Akyria. Craignant qu'elle se soit vraiment fait mal. Mais elle continua à donner des coups de griffes au mannequin qui furent plus profondes que les précédentes, mais toujours insuffisantes pour le faire réagir.

De nouveau elle abandonna et Elen stoppa immédiatement le mannequin. Mais ce qui m'inquiétait, c'était l'odeur. Akyria s'était blessée. Était ce grave ? Je m'en voulais, j'aurais dû intervenir pour ne pas que ça arrive. Je m'approchais promptement et elle m'interrompis dans mon élan en me montrant ses griffes et en lançant une boutade. J'étais inquiet, mais elle ne semblait pas s'en être rendu compte à première vue. Ce ne devait pas être trop grave. Lorsqu'elle le remarqua, elle se stoppa et tenta de cacher sa blessure. A sa remarque je cherchais à m'approcher davantage tout en évitant de lui faire peur.

"Ne t'inquiète pas, je..."
"Je sens l'odeur du sang !"

Nor... Espèce d'imbécile. L'ours en armure humait l'air d'un être intéressé. Mais le large sourire aux lèvres témoignaient de sa bêtise. Je secouais de nouveau la tête souriant malgré moi à sa mauvaise blague. Puis l'ours éclata de rire avant de se remettre à ses activités. Quant à moi, je demandais à Elen de me passer les bandages que nous avions préparer au besoin.

"Viens, ce n'est pas grave à première vue, mais on va quand même éviter que ça s'infecte."

Je la conduisais sur un banc proche d'une fontaine, et commençait rapidement à nettoyer la plaie avec de l'eau, avant de l'essuyer et de faire un bandage rapide. Elle put constater que je n'étais pas un professionnelle des soins, en effets, depuis que j'étais un vampire, je n'avais jamais vraiment eut besoin de panser mes plaies. La régénération naturelle vampirique faisant le nécessaire. Mais je connaissais les bases et le nécessaire pour éviter les problèmes plus grave.

"Très bonne idée les griffes de lumières. Avec un peu plus d'entrainement tu arriveras sûrement à le découper en deux ce mannequin. Après, n'oubli pas qu'il est plus résistant qu'un dragon. Ils ne ressentent pas la douleur. Ton attaque aurait repoussé nombreux dragons à mon avis."

J'avais dans l'idée de lui présenter mes propres griffes de ténèbres. Mais elles les avaient certainement déjà vues dans mes livres. C'était quelque chose de plus compact, de plus condensé en énergie pour rendre ce phénomène mortel. Elle allait y arriver à faire de même avec sa lumière, mais je pense, qu'elle manque un peu de réserve lumineuse pour l'exploiter à son plein potentiel.

"Tu devrais essayer de prendre un bain de soleil demain en usant de tes pouvoirs. Histoire de reconstituer tes stocks pour demain soir si tu veux revenir t'entrainer."

La proposition était lancée. A voir ce qu'elle en ferait.

Etonamment, les choses allèrent à la fois très vite, mais avec une fluidité stupéfiante. En un instant, j'avais pris conscience de ma blessure, avait eu honte de mon incompétence, peur de provoquer une réaction de gêne chez mes compagnons du soir, avant de passer à la stupéfaction face à l'énormité qu'un certain ours lâchait dans l'assistance, tout cela pour finir sur un calme plat, quelque part entre l'absurdité de la remarque et un état de légère dissociation.

Bien que cela pouvait sembler inquiétant, c'était aussi peut-être pour le mieux. Par ce fait, la boutade déplacée de Nor me passait au-dessus de la tête, et Malacay peut me récupérer sans réaction de ma part, comme si il manipulait une simple poupée. Il m'emmenait alors à l'écart, me faisait m'installer et commençait à appliquer les premiers soins sur la plaie que j'avais reçu.

Il était bon signe qu'elle ne soit ni profonde, ni très étendue. Au pire aurais-je une jolie cicatrice quelques temps. Ce qui était sûre, cependant, c'était qu'il faudrait attendre quelques temps avant de reprendre des exercices pratiques, par précaution.

Malacay me parlait tout en appliquant les bandages. Il me félicitait pour ma tentative de griffes lumineuses, et m'encourageait à croire en mon potentiel. Ses mots me réchauffait le coeur et je retrouvais peu à peu mes esprits, l'écoutant parler pour me détendre, serrant légèrement les crocs en sentant le tissu contre ma plaie.

De petits crépitements noirs parcouraient mes écailles par inadvertance, trahissant ma nervosité et ma douleur, agitant bien malgré moi mon propre mana. A ce sujet, ce que disait Malacay était une bonne idée. La lumière du jour serait sans doute une source viable pour recharger mon océan intérieur. Après tout, j'en avais besoin, aussi bien pour mon camouflage que pour ce que j'avais essayé d'appliquer.

Pendant des semaines, j'avais tenté d'apprendre les sorts d'Ombre contenu dans les livres du vampire, en vain. Pourtant, j'avais réussi à matérialiser la lumière et la modeler, même si c'était brouillon. Le coup des griffes était un cas d'école. Jamais je n'avais réussi à les créer avec mon ombre. Pourtant... avec la lumière, c'était venu plus simplement. Je me demandais pourquoi ?

Curieuse, et ayant besoin de finir ma soirée sur une note plus positive, je réitérais l'expérience, au calme et hors situation réelle. Tendant ma patte droite tout en gardant la gauche au sol pour maintenir mon équilibre, je concentrais de nouveau la lumière sur le bord de mes griffes, observant avec plus d'attention.

Je restais là, observatrice, avant de pousser un soupir de surprise, ébahie devant le spectacle. Je ne créais pas de lumière, ça nous le savions, puisqu'elle provenait du stock que je m'étais refait plus tôt. Et à l'invoquer autour de mes pattes, elle se diffusait dans l'air, cherchant avidement à s'échapper. Pourtant, elle gardait une certaine consistance, et la raison m'apparaissait enfin :

Presque imperceptible, de petits filaments d'ombres servaient de structure à l'ensemble, tel un maillage ou un filet, contraignant la lueur à rester en place. Je n'avais jamais observé ce phénomène avec mon camouflage pourtant.

Instantanément, je dissipais les lames sur ma patte et revêtais mon apparence blanche, m'examinant sous toutes mes coutûres, faisant tout de même attention à mon épaule blessée. Mais aucune trace du maillage ici. Je ne comprenais pas la différence.

Un peu désemparée par l'incompréhension, je me décidais à questionner Malacay, lui demandant si il avait une théorie à ce sujet. De fil en aiguille, j'en venais à l'interroger plus largement sur l'Ombre et la lumière. Après tout, il avait dit plus tôt dans la soirée que mon usage était atypique, donc sans doute avait-il vu bien d'autres usages au cours de sa vie.

Les exercices physiques passés, mon esprit était passé en mode théorique, prête à passer le reste de la soirée à l'écouter ici si besoin était.

En l'observant utiliser ses pouvoirs, je repensais à Aonir. Il n'avait jamais changé ses écailles de couleurs. Après tout il était déjà blanc. Ses ténèbres lui permettaient en revanche de capturer la lumière et de la réemployer au besoin. Vampirisé lui aussi, il l'utilisait surtout comme moyen de défense et de contre attaque. Mais parfois, il combinait les deux énergies pour des résultats bien plus surprenant. Faire coexister l'ombre et la lumière dans un même espace était impossible, et pourtant, la magie nous permettaient de dégager une grande énergie de cette impossibilité. Et Aonir, s'en servait pour se défendre généralement, et parfois pour attaquer avec cette force jugée impossible. Quant à moi, j'utilisais la lumière pour accroitre mes ténèbres. Dévorant cette dernière, dans l'unique but de créer des attaques encore plus redoutables encore. Je n'avais pas besoin de la lumière m'étais je dis un jours tandis que je perdais tout espoir. Mais aujourd'hui, c'était différent. J'avais l'impression d'avoir trouvé un peu du type de lumière que je recherchais. Mais comme à chaque fois, je craignais que ce soit éphémère.

Akyria me questionna alors sur ses pouvoirs, si j'avais des théories sur ce phénomène qu'elle observait. C'était une bonne question, pourquoi ses griffes de lumières étaient enveloppées de ténèbres et pas ses écailles ?

"Je pense que tu laisses seulement l'énergie lumineuse s'échapper par tes écailles pour changer ainsi de couleurs. Tandis que pour les griffes, tu emprisonne de l'énergie pour la concentrer. Le principe est différent ainsi que sa manipulation. Mais ce n'est que théories, il me faudrait plus de temps pour m'en assurer."

Je réfléchissais un instant.

"Je connais quelqu'un qui utilise la lumière un peu comme tu l'emploies. Un vampire pour qui j'éprouve énormément de respect. Le second vampire pour être exacte. Son emploi était légèrement différent, plus axé sur la défense et la contre attaque. Assimilant la lumière pour la redéployer immédiatement. Mais il la combinait aussi aux ténèbres, ce qui donnait ce pouvoir aussi puissant que terrifiant. Nous l'avons nommé, l'anti lumière ou vraies ténèbres."

Joignant le geste à la parole, je me concentrais pour retrouver un peu d'énergie lumineuse et invoquer une petite sphère entre mes serres. Une sphère d'un noir profond et brillant. La surface semblait brillée, mais l'intérieur était noire. C'était difficile à croire et à imaginer. Une aberration de la nature. Je refermais mes griffes dessus et la sphère disparue et absorbant toute la lumière alentours avant de générer un faible éclat lumineux.

"La nuance est faible. Moi je maitrise les vraies ténèbres. Le dragon dont je te parle maitrise l'anti lumière. C'est un stade plus avancé où les deux cohabitent de manière instables. S'autodétruisant mutuellement dans le but de générer une énergie terriblement forte, mais instable. Dans les vraies ténèbres, nous renversons l'ordre naturel ou la lumière vain les ténèbres en éclairant l'ombre. Créant ainsi une sorte de puit ou la lumière se fait absorbée et ne peut s'échapper."

De nouveau, je joignit le geste à la parole et la lumière s'éteignit autours d'une sphère que je venais d'invoquer. Ne laissant qu'une forme noire opaque à l'endroit de la sphère d'où aucune lumière ne pouvait s'échapper. Je cessais rapidement cet exemple.

"Donc dans la famille ténèbres, nous avons les ténèbres, tout ce qu'il y a de plus classique, l'ombre du quotidien. Les vrais ténèbres qui absorbent la lumière. Une faculté magique qui n'existe naturellement. L'anti lumière qui provoque les deux éléments de manière instable. Et de ce que je vois, il semblerait que tu parviens à les faire cohabiter de manière non destructrice. En suivant la logique, je nommerais cela de l'anti ténèbres puisque tu les emplois les deux de manière stable. A l'opposé du coup de l'anti lumière."

La discussion changeait donc, prenant une tournure de cours magistrale alors que Malacay réflechissait à la manière de donner satisfaction à mes interrogations. Cela se sentait un peu qu'il avait du vécu, qu'il avait accumulé des siècles de connaissances si ce n'est plus, dont il m'en faisait voir une infime parcelle.

Il commençait par le sujet le plus simple, et le plus actuel, abordant ma question immédiate. Sa théorie faisait sens, bien que je ne pouvais ni confirmer ni réfuter celle-ci. Simplement apparente autour de mes écailles, la lumière pouvait bien se diffuser que cela ne posait guère de problèmes. Mais j'en venais à me questionner sur le risque qu'un dragon un peu expérimenter puisque voir la fine couche sur mon corps. Je me notais dans un coin de mon esprit la nécessité de toujours progresser dans mon camouflage pour, peut-être un jour, le rendre véritablement indétectable. Le vampire concluait néanmoins sur la nécessité de conduire de plus amples recherches.

Il marquait une pause plus ou moins longues, pendant laquelle j'en profitais pour jeter un coup d'oeil derrière lui, appercevant au loin Ereon et Elen avec les autres, faisant que j'étais seule à seul avec le dragon rouge. Il reprenait ensuite, et je continuais de l'écouter avec attention, opinant régulièrement du chef.

Ma curiosité était piqué lorsqu'il mentionnait une connaissance aux capacités similaires des miennes. Avec le temps, j'avais fini par comprendre de qui il s'agissait, mon protecteur était à la fois très bavard mais aussi très évasif quand cette personne devenait sujet de conversation. Par respect, je ne posais aucune question qui risquerait d'être déplacée, mais j'espérais bien avoir l'occasion de le rencontrer un jour. D'autant plus que j'aurai probablement bien des choses à apprendre d'un tel dragon.

Mes questionnements personnels s'intensifièrent quand Malacay expliquait que ce vampire était capable de défenses et de ripostes avec son pouvoir. Cela contredisait un peu mes expériences du soir, puisque j'étais incapable de toucher quoique ce soit avec mes filaments. Et mes griffes de lumières n'avaient été testé que sur un manequin nourrit de magie noire.

"L'anti-lumière...?" questionnais-je.

Je comprenais l'idée, tout en la trouvant un peu absurde. Après tout, l'Ombre par sa nature s'oppose déjà à son opposé naturelle. Qu'il s'agisse d'un souffle obscur qui repousse toute lueur ou ma propre magie qui étouffe sa cible. Mais le plus aberrant était sans doute l'évocation d'un savant mélange entre les deux natures élémentaires.

Je repensais à mes propres capacités. A aucun moment il n'y avait fusion chez moi. Mon camouflage était une pélicule de lumière 'sur' mes écailles, les griffes étaient de la lumière 'étreinte' et 'maintenue', quand à celle qui flottait en mon âme, elle dérivait dans un océan noir sans jamais s'y dissoudre ou s'y diluer. Tout cela me rendait dubitative, tout en allumant un flamme ardente d'apprentissage dans mon regard.

Malacay avait dût s'en appercevoir vue la suite de ses explications, me faisait une démonstration, certainement car l'exemple était plus parlant que de longues leçons. Entre ses griffes apparaissait un corps sphèrique, sans couleurs. A sa surface luisait la lumière mourrante qui tentait de combler ce vide qu'il avait au creux de sa patte. Et quand il dissipait son sort, la Nature reprenait ses droits, la lumière remplissait cet espace creux, provoquant un léger flash en guise de réaction. C'était stupédiant.

Les explications reprenaient, et je faisais de mon mieux pour assimiler tout cela. A force de réflexion, j'en venais à comprendre que Malacay éradiquait purement et simplement la lumière qui tentait d'arriver à son contact, comme une éponge qui absorberait des gouttes de pluie tout en restant infiniment sèche.

Le compagnon qu'il mentionnait, Aonir il me semble, parvenait à une prouesse dont peu sont dignes, arrivant à maintenir en un même espace deux essences vouées à se dévorer mutuellement. Cet affrontement naturel, maintenu dans un état de stase, finissait inévitablement par rompre, source de son pouvoir et de sa puissance.

Puis il y avait moi, dont le cas ne rentrait ni tout à fait d'en l'un, ni tout à fait dans l'autre. Une lumière qui tombe dans mon puit intérieur, sans pour autant se confronter à ma propre essence, sembable à de l'huile dans de l'eau.

Le nom donné par le grand vampire me plaisait bien, mais je trouvais cela peut-être un peu prétentieux de vouloir donner une telle appellation. Le commun des dragons pourraient trouver cela bizarre de vouloir dénommer un nouvel élément. Ou plutôt un sous-ensemble de l'élément des Ombres.

Dans mon esprit revenaient quelques unes des nombreuses leçons que j'avais reçues depuis mon arrivée à la Montagne de la Mort, notamment sur les éléments existants. Chanceuse que j'étais de l'honnêteté du vampire cramoisi, j'avais accès à bien des connaissances, sans filtres.

Ainsi avais-je en apprendre sur les huit éléments primordiaux, séparés en deux groupes opposés, et matrîsés à la perfection par les deux héros d'antan. Mais également leur source, un état nommé 'Aether', qui serait l'apanage de Spyro, Cynder, et l'ancien mentor de cette dernière : le terrible Malefor.

En-deça se trouvaient tout un ensemble d'éléments annexes, dérivés des premiers ou nés de leurs subtiles interactions. L'élément de la lumière était l'un d'entre eux, produits des flammes les plus chaudes et de la foudre la plus puissante. J'avais lu que les dragons aptes à un tel élément avaient un contrôle parfait sur celle-ci, et étaient donc craints de tous mes congénères, même les plus doués dans l'élément de l'Ombre.

La capacité à absorber la lumière contrebalançait cela. Et je me rendais compte à quel point tout en ce monde cherchait un état d'équilibre. Cela faisait naître en moi un impérieux désir de découvrir et d'expérimenter ce dont j'étais capable, ce qu'autrui pouvait faire, comment tout s'imbriquait dans l'ensemble.

Pour la première fois depuis un petit moment, j'en venais à oublier les conflits, les violences, les jeux de pouvoirs ou la haine absurde que les uns ont envers les autres. Tout cela semblait si futile aux yeux de la petite dracène que j'étais.

"J'ai l'impression d'être au bord d'un précipice... Mais avec une infinité de choses à découvrir de l'autre côté. C'est... grisant..." murmurais-je, bien que parfaitement audible.

Sur-motivée, je testais un peu à l'improviste diverses idées qui me traversaient. Certaines sérieuses, d'autres loufoques. Par exemple, ayant retiré mon camouflage, j'essayais de ne le matérialiser que sur certaines zones, avec des résultats très variables.

Ou d'essayer de réaliser le même genre de sphères que celles de Malacay. Avec zéro succès pour cela. Qu'importe mes efforts, à aucun moment je n'arrivais à créer un objet qui soit détaché de mon corps. Et ce, que ma tentative soit avec de la lumière stockée ou mes propres ténèbres. Ma magie était toujours en contact moi, d'une manière ou d'une autre.

Ayant expérimenté jusqu'à satisfaction, je reportais soudainement mon attention sur Malacay que j'avais un peu oublié avec mon excitation d'apprendre.

"Je dois te remercier Malacay. J'ai énormément appris grâce à toi ! Et il y a temps qu'il me reste à découvrir ! Je veux vivre hyper longtemps et apprendre autant que je le peux !" m'exclamais-je, ne sachant calmer ma joie, relâchant sans vraiment faire gaffe mon mana, créant de multiples filaments noirs sur mon corps, dansant à la surface de mon corps au rythme de mes émotions.